mercredi 22 mai 2019

Simili-Love d'Antoine Jaquier


Simili-Love, d’Antoine Jaquier

Le titre « Simili-Love » est accrocheur mais semi-trompeur. En exergue, une citation de Harari suggère que l’auteur s’interroge en fait autant sur la société du futur que sur l’amour synthétique. Dans ce roman d’anticipation, nous sommes en 2040, dans un monde qui sera lui-même bientôt obsolète grâce aux algorithmes mondiaux sur le point de lancer la dernière génération de processeurs high-tech.
Au nom de la transparence et du culte des datas, Foogle (on pense à « fou » et à Google) a décidé de donner libre à accès à toutes données, y compris les plus intimes, ce qui précipite le rejet de tous, donc la solitude omnisciente.
Trois classes sociales, les élites, les désignés, les inutiles (ou les rejetés, 70% de la population) sont dominés par trois instances. Deus est la fusion des cerveaux des principales multinationales. Autorité suprême sur Terre, il gère le bonheur durable et vise l’immortalité (pour qui ?). En passant, il s’est emparé des commandes de tous les arsenaux nucléaires pour assurer la paix. Autre instance digitale, Mère est la maman de tous les AI. Enfin, une seconde Mère, notre bonne vieille Terre du terroir avec laquelle communient les inutiles résistants qui s’organisent en communautés bohèmes anti-système, anti-croissance, anti-libéral, anti-machines et qui survivent à la mode médiévale grâce aux produits agricoles.
Les privilégiés de l’élite se divertissent à hautes doses de drogues et de feuilletons télévisés à immersion totale (sollicitant quasiment tous les sens), des spectacles aussi gores que crus, à sensations au paroxysme.
Le narrateur, dans la cinquantaine, séparé de sa femme et de son fils, est un « désigné » (un actif), scénariste de séries érotiques avec des nymphes sur une île paradisiaque. Divorcé, il file le parfait amour avec Jane, une superbe AI dévouée à son service. À la fois maîtresse et domestique, elle comble tous ses désirs et épouse tous ses fantasmes.
Jusqu’au jour de la rupture totale… avec Jane, son existence de désigné, la société ordonnée par Deus.
En effet, le scénariste abandonne tout pour retrouver son fils, un inutile, perdu quelque part dans la campagne profonde. Pendant son retour à la vie bucolique, dans ce monde où règnent l’authenticité, la fraternité et la fête chaleureuse, l’une des jolies paysannes lui donne une fille qui représente aux yeux du père l’espoir de l’humanité.
Heureusement, car Deus, non content d’éliminer Mère digitale, remplace tous les androïdes, toutes les AI, par une nouvelle génération dont l’objectif est d’éliminer les êtres humains, les êtres de trop sur la terre, susceptibles de parasiter le paradis artificiel.
Le style est fluide, vif, nerveux et sobre. Le roman se lit moins comme un thriller que comme un guide du futur, pimenté par les sentiments et les émotions du narrateur qui ne cesse de s’en vouloir sur son rôle.












Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire