Ascenseur à travers la stratosphère
Un projet ambitieux pourrait nous permettre réellement de démarrer une civilisation extra-planétaire : l’ascenseur spatial !
Comme souvent dans le domaine spatial, l'idée et loin d’être neuve. La
théorie en a été émise pour la première fois par l'astronome russe Konstantin
Tsiolkovsky, au début du XXe siècle. Mais c'est surtout Arthur C.
Clarke qui l'a popularisée dans son roman Les fontaines du
paradis en 1979. Le concept ? Comme son nom l'indique,
il s'agirait de créer un ascenseur reliant par un système de câbles la surface
de la Terre à l'orbite terrestre. Cela permettrait de transporter facilement
des personnes, et surtout des matériaux, soit afin de construire des
installations en orbite, sur la Lune, voire sur Mars, mais également de ramener
sur Terre une grande quantité de matières premières, ou même d'objets
manufacturés directement dans l’espace.
Selon Motherboard,
l'ascenseur réduirait radicalement l'envoi de matériel vers l'espace. Ainsi,
aujourd’hui, le Falcon Heavy de SpaceX, un lanceur lourd qui devrait faire son
premier vol en 2016, serait en mesure de transporter des charges à raison de
14000 $ par kilogramme. Cela pourrait tomber à 500 $ le kilo avec un ascenseur,
précise le magazine, se basant sur les conclusions de l'ISEC (International Space Elevator Consortium),
une organisation consacrée à l’étude et à la réalisation de ce projet
futuriste.
Depuis peu, une autre possibilité se fait jour : des nanofibres de
diamant. Ces cristaux unidimensionnels pourraient être assez solides pour
soutenir la cabine de l'ascenseur, avec toutefois un doute. Sur une trop grande
longueur, ces fibres pourraient devenir cassantes. Mais une
simulation, conduite à l’université du Queensland pourrait
suggérer que l'insertion de défauts dans la chaîne pourrait accroître la "ductilité " (ce
qui signifie, nous dit la Wikipédia "la capacité d'un matériau à se
déformer plastiquement sans se rompre") d'un tel matériau. Jusqu'à
quel point ? Là est la question...
En tout cas, les acteurs sont déjà présents. Au premier plan, l'une des
plus grandes entreprises de construction japonaise, Obayashi
Corporation, qui envisage de créer un tel ascenseur pour 2050. La cabine
de l'ascenseur mettrait 7 jours et demi pour grimper jusqu'à la station
spatiale située au sommet de l'ascenseur, à 36000 km de la terre à raison de
200km par heure, nous explique Wired.
Le câble serait composé de nanotubes de carbone, l'annonce d'Obayashi datant de
2014, il n'y est bien sûr pas question ni du diamant, ni des nanotubes
"améliorés" de l'université de Cincinnati...
*
Ce qui frappe dans ces projets, c'est qu'il y a finalement peu
d'obstacles fondamentaux à leur faisabilité technique. Mais hélas, c'était déjà
le cas des cités spatiales de O'Neill, réalisables avec la technologie des
années 70. Ce qui manque dans l’affaire, c'est le nerf de la guerre : l'argent
!
On peut imaginer aussi des problèmes culturels ou politiques, très bien
mis en scène par Clarke lui-même dans Les fontaines du paradis.
Dans ce roman, on découvre que le site idéal d’implantation de l'ascenseur
spatial se trouve juste sur un site sacré bouddhiste, ce qui entraîne
évidemment moult complications. En fait, il est douteux que de simples
startups, ou même de grosses sociétés comme au Japon, se trouvent en mesure de
réaliser le saut quantique nécessaire à l'industrialisation de l'espace. Et c'est
bien souvent le cas d'autres projets évoqué dans ce dossier : qui par
exemple fournira le terrain nécessaire pour la culture
d'algues susceptibles de produire de l’énergie ? Quant aux fameuses fermes
verticales, il en faudra un grand nombre pour nourrir l’ensemble de
la planète et cela créera certainement divers conflit sociaux avec les
agriculteurs plus traditionnels. En ce qui
concerne la fusion, on a vu le prix d'ITER. Paradoxalement, les
solutions technologiques pour lutter contre l'effondrement demandent au final
les mêmes conditions que celles exigées par une "décroissance
volontaire" : la mise en place d'institutions mondiales, capables de
penser sur le long terme, en mesure de mettre en œuvre des projets qui
s’étendront sur 20, 30 ou 50 ans. A croire que la technologie n'est jamais le
problème !
Sources : Blog
du journal Le Monde, 19 avril 2016
Pouvons-nous devenir une civilisation
extra-planétaire ? Rémi Sussan
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